Par Marie Claude et Christian Gendron

La conférence du 3 mars a été consacrée à un sculpteur vendéen méconnu, Jean Garnier, présenté par M. et Mme Gendron, historiens de l’art. Christian Gendron est en effet conservateur honoraire des musées de France et Marie-Claude Gendron professeur d’histoire de l’art et d’arts plastiques. C’est devant un public toujours nombreux qu’ils se sont exprimés, Mme Gendron développant la biographie du sculpteur, M. Gendron présentant ses œuvres à l’aide de nombreuses diapos, objets et documents.
Jean Garnier est né à Mouzeuil (85) le 14 mars 1853 dans une famille de menuisiers. Son père étant décédé 8 mois avant sa naissance, sa mère élève seule ses 4 enfants avec son humble travail de journalière. Ses deux sœurs seront lingères et son frère menuisier.
Comment, dans ce milieu modeste, Jean Garnier a-t-il pu se cultiver et s’adonner à l’art puis partir
pour Paris ? On ne le sait pas, de même qu’on a aucun portrait de lui.
C’est l’époque de la création des grands magasins et Jean Garnier veut que ses
œuvres soient dans tous les foyers. Aussi sont-elles présentées dans des catalogues, comme
ceux du Bon Marché et de Manufrance, et divulguées en grande quantité, grâce notamment aux
tirages en multiples. Ce sont des objets utilitaires (plateaux à cartes, vide-poches, pichets etc) et
décoratifs (statuettes, vases) dits “étains d’art”. On en connaît plus de 500.
Le style de Jean Garnier évolue au cours des années et des courants artistiques.
Sa première période, à partir de 1883, s’inspire de l’antiquité. La mythologie sera un thème
récurrent dans son œuvre, notamment le monde de l’eau et de l’air. Une de ses
caractéristiques est le drapé mouillant, cachant et soulignant à la fois les formes féminines. La
deuxième période est historisante, influencée principalement par le siècle de Louis XV. Puis,
grand moderniste, il s’intéresse à tous les progrès techniques et scientifiques : astronomie, train,
aviation, vélocipède etc…(il produira ainsi des bouchons de radiateur de voiture). Mais il
représente aussi dans ses œuvres le peuple au travail : artisans, paysans, dockers, sabotiers,
jardiniers, violoneux etc… et autant les femmes que les hommes (en cela il fait preuve
d’originalité). Jean Garnier travaille différents matériaux, aussi divers que le bronze, l’étain, la
terre cuite, la porcelaine, le régule, montrant par la même combien il maîtrise techniquement son
art.
En 1910, il quitte Paris et rentre à Mouzeuil (85). En 1925, il s’intéresse à l’art
déco. Il continue à produire des œuvres jusqu’en 1929, le train lui permettant de les
envoyer aux fonderies à Paris et jusqu’en Allemagne.
A la demande de la municipalité il réalise le monument aux morts de Mouzeuil.
Mais ces œuvres se vendent-elles moins bien ? il vit pauvrement, dans une petite
maison , constituée d’une seule pièce de 20 m² et couverte de roseaux. il marche difficilement et se déplace avec sa charrette selon les témoignages des contemporains, certainement un fauteuil roulant. En 1929 il entre à l’hospice de Fontenay-le-Comte, puis à l’hôpital où il décède le 27 avril 1930. Son corps est déposé dans la fosse commune du cimetière.
Pourquoi Jean Garnier est-il tombé dans l’oubli ? l’explication tient peut-être à son départ de Paris, où il avait une certaine notoriété, son caractère indépendant, son refus de la célébrité.
A la fin de la conférence, le public, très intéressé, a pu examiner de près des œuvres du sculpteur apporté par M. et Mme Gendron et bénéficier d’explications supplémentaires données volontiers par les conférenciers avant de se retrouver autour du traditionnel vert de l’amitié.